En peignant la girafe by Frédéric Dard

En peignant la girafe by Frédéric Dard

Auteur:Frédéric Dard
La langue: fr
Format: mobi, epub
Tags: San Antonio
Éditeur: Fleuve noir
Publié: 2011-04-09T17:00:00+00:00


CHAPITRE VII

Ce qui passionne le plus les Turinois, ce n'est ni l'assassinat de Giuseppe Farolini, ni celui des Grado's, ni celui du Duc de Guise; ce n'est pas non plus le vol du prestigieux tableau, bien qu'il se soit effectué en des circonstances mystérieuses. Non, ce qui fait couler le plus d'encre et de salive, c'est la fugue des quinze tigres. Un mort, ça ne mord pas, si je puis me permettre cette astuce phonétique, et un tableau volé moins encore, quand bien même ledit tableau représenterait le portrait de Fernandel ; mais quinze tigres du Bengale, ça ne se nourrit pas de Banania. _ Aussi, dans la vaillante cité piémontaise, chacun songe-t-il à ses miches et à celles de ses enfants en se disant qu'elles constitueraient un en-cas valable pour un pauvre tigre en rupture de cage.

Les pompiers, le génie, les chars, les bersagliers, les policiers, les gendarmes et les hélicoptères sont entrés en campagne et draguent à fond dans la région. Lorsque le soir est venu, quatorze fauves ont regagné leur base, mais le quinzième est-toujours absent. M.

Barnaby qui espérait pouvoir au moins donner une soirée doit déchanter. Tant qu'un seul tigre restera en cavale, les représentations ne seront pas autorisées. Mieux : la Préfecture lui interdit de quitter la ville. Le pauvre bonhomme ne sait plus à quel sein se vouer. Enfermé dans sa roulotte-palace, il siffle des bouteilles de whisky en battant sa femme comme au bon vieux temps de leurs débuts.

Il est en pantalon de cheval et maillot de corps lorsque je toque à la porte de sa gentilhommière.

- Qu'est-ce que c'est ? rugit Barnaby.

J'entre. Il me vaporise son regard sombre comme un séminaire congolais en voyage. Sa baleine blonde se fait les tarots pour tromper l'attente. Elle m'offre son sourire en gold véritable, plus un trente-troisième tabouret mais en bois celui-là.

- Cher patron, attaqué-je, je voudrais vous parler.

- J'ai pas le cœur à parler ! avertit le boss.

- On dit ça quand on est morose, mais on s'aperçoit très vite que parler soulage, assuréje.

Voulez-vous que nous causions des Grado's ?

- Y a plus rien à en dire puisqu'ils sont morts, objecte avec pertinence M. Barnaby.

L'argument est de poids, comme la femme du bonhomme; mais il ne me décourage cependant point.

- Deux assassinats dans l'enceinte du cirque, c'est beaucoup, vous ne trouvez pas ?

Il répond que ce qui l'intéresse c'est son quinzième tigre et que, sorti de là, ses contem-porains morts ou vivants lui importent peu; le tout dans un langage beaucoup moins châtié que le mien, cela va de soie, comme me le faisait remarquer un ver qui filait du mauvais cocon.

- Je voudrais vous confier un petit secret, monsieur Barnaby, dis-je.

Il allume un cigare long de soixante-dix centimètres, expulse une goulée de fumée que ne désapprouverait pas une locomotive électrique et grogne

- Vous me prenez pour un curé

- Pas précisément. Mais vous êtes mon patron et je dois à ce titre tout vous dire pour être sûr de ne rien vous cacher, exact ?

- Bon, causez ! invite Barnaby.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.